Le 15 novembre 2019, le réseau de chercheurs COADAPHT, représenté pour l’occasion par Olivier BONNET, membre du CERPAM, était invité à Oslo par l’Institut norvégien pour la Recherche rurale et régionale (RURALIS) dans le cadre du projet “Grazing resources, large carnivores and local communities”. La demande était de présenter un bilan sur la gestion de la prédation due au loup en France, devant une assistance composée des représentants des Ministères de l’Agriculture ; de l’Environnement et du climat ; des associations d’éleveurs ; des associations environnementales ; des éleveurs et des chercheurs. La conférence a été préparée avec Michel Meuret, chercheur INRA et animateur du réseau COADAPHT. Nous avons ainsi exposé l’échec de la politique de gestion de la prédation sur les troupeaux ovins en France par la seule généralisation des moyens de protection en multipliant clôtures, bergers et chiens de protection. En effet, malgré les efforts des éleveurs, le nombre de victimes a continué à augmenter en lien direct avec l’augmentation de la population de loups sur le territoire.
L’exposé a été très bien reçu par l’ensemble des acteurs norvégiens présents. En effet, malgré un contexte sensiblement différent, les difficultés rencontrées face à la prédation sont les mêmes : très forte prédation sur les troupeaux, désespoir des éleveurs, déni de la réalité et mise en cause du travail des éleveurs par les défenseurs du loup… Le plus étonnant est que les éleveurs norvégiens se font accuser d’être une exception en Europe et que partout ailleurs, la cohabitation entre les prédateurs et l’élevage extensif se passerait bien… le même discours qui est tenu aux éleveurs français ! Deux exceptions qui semble finalement être la règle… on imagine avec quel soulagement les Norvégiens ont accueilli cet exposé de la situation française.
La Norvège doit faire face à quatre grands prédateurs : l’ours brun, le lynx, le glouton et le loup. L’élevage durant l’été y est extrêmement extensif avec des troupeaux ovins, mais aussi des bovins et des rennes, pâturant librement sur des dizaines de milliers d’hectares : impossible dans ces conditions de surveiller les troupeaux de façon permanente ni de recourir au regroupement nocturne en parcs clôturés. La politique de gestion de la prédation y est également très différente. Le pays est divisé en deux types de zones : des zones prioritaires pour chacun des quatre grands prédateurs où leur abattage est interdit et où l’élevage est en train de disparaître du fait de la trop forte pression de prédation. Et des zones où l’élevage est prioritaire, où l’abattage des prédateurs s’en prenant aux troupeaux est autorisé mais où la pression de prédation reste très forte, surtout en bordure des zones protégées d’où essaiment les prédateurs.
Il nous faut continuer à travailler avec nos collègues européens, afin que les autorités mettent en place des politiques publiques de gestion de la prédation basées sur les réalités de terrain, et non plus sur le rejet systématique de la faute sur les éleveurs « qui ne savent pas se protéger ».